
17 Fév Questions/Réponses webinaire ADP du 10 avril 2025
Harcèlement en entreprise : un risque psychosocial en pleine mutation
Le 21 janvier 2025, l’affaire France Télécom a trouvé son dénouement avec la condamnation de ses dirigeants pour harcèlement moral « institutionnel » . Le 5 février 2025, la défenseure des droits a publié une décision-cadre destinée aux employeurs publics et privés en matière de harcèlement au travail.
Harcèlement moral, institutionnel, environnemental, d’ambiance… ces dernières années, force est de constater le développement des litiges liés au harcèlement dans le cadre des conflits entre salariés et employeurs, alors même qu’il est encore complexe pour l’ensemble des parties d’identifier clairement les situations relevant du harcèlement au travail.
L’occasion d’étudier les recommandations de la décision-cadre ainsi que les obligations de l’employeur en matière de prévention des RPS.
Au programme de ce webinaire :
- Les obligations de l’employeur en matière de RPS
- Prévenir et évaluer les risques de harcèlement au travail
- Les risques pour l’employeur en cas de harcèlement dans l’entreprise.
- Les recommandations de la défenseure des droits

Quels sont les risques psychosociaux qui doivent être intégrés au Document Unique ?
Tout employeur ayant au moins un salarié est tenu d’établir un document unique, conformément à l’article R. 4121-1 du Code du travail.
Bien qu’il n’existe pas de modèle standard, le document doit être unique, sous forme écrite ou informatisée. Il identifie et répertorie les sources potentielles de risques, analyse les conditions d’exposition des salariés à ces risques et propose des actions préventives.
Le document peut être établi par « unité de travail », une notion large couvrant des situations de travail similaires, même pour différents types de postes et lieux de travail.
Ce document doit être révisé au moins annuellement, ou lorsqu’un changement dans les conditions de travail, de santé ou de sécurité se produit, ou tout événement modifiant l’évaluation des risques (C. trav., art. R. 4121-2).
Dans les entreprises de moins de 11 salariés, la mise à jour peut être moins fréquente (C. trav., art. L. 4121-3, al. 3).
Les risques évalués incluent ceux affectant la santé mentale des salariés, au-delà de leur santé physique et sécurité matérielle. Le défaut de prise en compte des risques psychosociaux et des mesures de prévention dans le document unique peut engager la responsabilité civile et pénale de l’entreprise. Après la création de ce document unique, un plan d’action doit être proposé pour remédier aux insuffisances constatées.
Identification des indicateurs de risques :
▶️ les exigences du travail (quantité, pression temporelle, complexité, équilibre vie professionnelle/vie privée) ;
Cette catégorie initiale englobe les concepts d’« exigences psychologiques » selon le modèle de Karasek et « d’efforts » d’après le modèle de Siegrist. Elle inclut également des éléments comme les contraintes de rythme, la présence d’objectifs irréalistes ou peu clairs, la nécessité de polyvalence sans formation adéquate, les consignes contradictoires, les journées de travail prolongées, les horaires de travail atypiques, ainsi que l’imprévisibilité des horaires de travail.
▶️ les exigences émotionnelles (contact avec le public, gestion des émotions)
Les exigences émotionnelles concernent la nécessité de gérer ses émotions, de les dissimuler ou de les simuler. Elles sont particulièrement présentes dans les métiers de services, où l’on peut rencontrer des tensions avec le public. Cette exigence de dissimulation émotionnelle peut également s’appliquer à d’autres secteurs lorsque la culture d’entreprise impose un contrôle total de soi en toutes circonstances et une démonstration permanente d’une « attitude positive ».
▶️ l’autonomie et les marges de manœuvre
L’autonomie au travail se réfère à la capacité d’être proactif dans ses tâches professionnelles. Elle est liée au concept de « latitude décisionnelle » du modèle « job strain » de Karasek et englobe non seulement la possibilité de s’organiser soi-même dans son travail, mais aussi la participation aux décisions ayant un impact direct sur ses activités, ainsi que l’opportunité d’utiliser et de développer ses compétences.
▶️ les relations sociales et de travail (coopération, reconnaissance, management)
Les relations sociales au travail ont fait l’objet de nombreuses études, notamment à travers le concept de « soutien social » du modèle de Karasek, l’« équilibre efforts/récompenses » du modèle de Siegrist. Cette catégorie couvre les relations professionnelles avec les collègues et la hiérarchie, les perspectives d’évolution de carrière, l’adéquation des tâches aux compétences de l’individu, les méthodes d’évaluation du travail, ainsi que l’attention accordée au bien-être des employés.
▶️ les conflits de valeur
Les conflits de valeurs font référence aux tensions internes qui surviennent lorsque les exigences professionnelles entrent en contradiction avec les valeurs personnelles, sociales ou professionnelles des employés.
▶️ l’insécurité socio-économique
Cette catégorie englobe à la fois l’insécurité socio-économique, telle que la crainte de perdre son emploi ou la précarité du contrat de travail, ainsi que le risque de changements non maîtrisés dans les tâches et les conditions de travail, comme les restructurations.

Quelle est la procédure à suivre en cas de harcèlement dans les entreprises de moins de 50 salariés ?
Conformément à l’article L. 1153-5 du Code du travail, l’employeur doit prendre toutes les dispositions nécessaires pour prévenir, arrêter et sanctionner le harcèlement. (C. trav., art. L. 1153-5).
Parmi les actions possibles :
1️⃣ mener une enquête hiérarchique avec la possibilité d’être accompagné par un représentant du personnel pour garantir la neutralité ;
2️⃣ évaluer les risques et rédiger le document unique ( trav., art. R. 4121-1)
3️⃣ organiser des formations pour le personnel d’encadrement ( trav., art. L. 4121-1) ;
4️⃣ sensibiliser les salariés à la législation sur le harcèlement ;
5️⃣ réaliser des enquêtes par le CSE ou les représentants du personnel ;
6️⃣ faire intervenir le médecin du travail ;
7️⃣ engager une médiation avec l’inspection du travail ;
8️⃣ appliquer des sanctions disciplinaires ;
9️⃣ et protéger les victimes et les témoins. (en savoir plus : ministère du travail)

Quelle mesure choisir dans l’échelle des sanctions ?
Concernant l’auteur des faits de harcèlement, les articles L. 1152-5 et L. 1153-6 précisent que tout salarié “ayant procédé à des faits de harcèlement moral ou sexuel est passible d’une sanction disciplinaire”.
Le règlement intérieur doit impérativement mentionner les sanctions applicables au harcèlement. Le harcèlement doit donc être sanctionné de manière répressive et préventive.
Une sanction clémente, comme un avertissement ou une mutation, peut ne pas suffire pour remplir l’obligation de sécurité de résultat de l’employeur.
Un licenciement, notamment pour faute grave, nécessite une preuve solide des agissements reprochés. L’employeur doit prouver de manière incontestable la réalité et la certitude des faits justifiant le licenciement.
Pour une sanction disciplinaire, l’employeur dispose d’un délai maximal de deux mois à partir de la connaissance des faits de harcèlement pour agir. Les enquêtes doivent donc être menées rapidement, d’où l’importance de définir à l’avance les modalités de l’enquête.
Le harcèlement sexuel est considéré comme une “faute grave”, rendant impossible le maintien du salarié dans l’entreprise, même durant le préavis, et le privant des indemnités de préavis et de licenciement.

Comment faire appel à la médiation en matière de harcèlement moral ?
Toute personne s’estimant victime de harcèlement moral, y compris celle mise en cause, peut initier une procédure de médiation (C. trav., art. L. 1152-6).
L’entreprise peut simplifier le processus de médiation en proposant une liste de médiateurs agréés par le CMAP (Centre de médiation et d’arbitrage de Paris) et en organisant des sessions d’information sur le rôle et la nature de la médiation.
Le processus de médiation se déroule en trois étapes :
▶️ une phase initiale d’information,
▶️ une tentative de conciliation
▶️ la formulation de propositions qui doivent être consignées par écrit.
En cas d’échec :
Le médiateur informe les parties des sanctions possibles et des garanties procédurales prévues pour la victime.
La médiation est particulièrement utile dans les cas de harcèlement moral où il est nécessaire de préserver le lien entre les parties, notamment lorsque le contrat de travail de la victime et de l’accusé est toujours en vigueur. La loi ne précise pas si les éléments recueillis pendant la médiation peuvent être utilisés dans une procédure judiciaire ultérieure. Bien que le médiateur soit soumis au secret professionnel et à une obligation de confidentialité, il n’est pas explicitement indiqué que les déclarations et constats des parties sont inadmissibles dans d’autres procédures.

Comment agir en cas de burn-out ?
Les actions qui peuvent être menées par l’employeur pour prévenir les risques de surmenage professionnel :
▶️ Former et de sensibiliser les collaborateurs, les managers et les représentants du personnel (CSE) sur les risques liés au surmenage.
▶️ Détecter les salariés qui rencontrent des difficultés, dans l’avancement ou l’accomplissement de leur travail
▶️ Mettre en place une démarche QVCT (en savoir plus)
En cas de burn-out avéré :
▶️ Déclencher une visite médicale pour tout salarié qui présenterait certains symptômes.
▶️ solliciter une enquête auprès du supérieur hiérarchique et recueillir des témoignages
▶️ Mobiliser les missions d’inspection et d’alerte du CSE : inspections en matière de santé, de sécurité et des conditions de travail, enquêtes obligatoires, le droit d’alerte en cas d’atteinte aux droits à la santé physique ou mentale des personnes, expertise en cas de risques graves identifiés, y compris en cas de risques psycho-sociaux.
Peut également être reconnue d’origine professionnelle, une maladie non désignée dans un tableau de maladies professionnelles, mais lorsque deux conditions cumulatives sont remplies :
▪ lorsqu’il est établi que la maladie est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime ;
▪ et qu’elle entraîne le décès de celle-ci ou une incapacité permanente d’un taux au moins égal à 25%.
Si ces 2 conditions sont remplies, la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) reconnaît l’origine professionnelle de la maladie après avis motivé d’un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP)
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