
17 Fév Questions/Réponses webinaire ADP du 13 février 2025
Réserves motivées AT/MP : leviers pour l’employeur, bonnes pratiques et impacts
La déclaration d’accident et le questionnaire maladie professionnelle ne sont pas des actes anodins et doivent faire l’objet d’une vigilance accrue de la part des employeurs. Pour agir et interagir dans l’instruction de la CPAM avant la décision finale, il est indispensable de clarifier la procédure d’émission des réserves motivées et d’explorer les implications légales et financières qui en découlent pour les employeurs comme pour les salariés.
Au programme de ce webinaire :
- Définition et nature juridique des réserves motivées
- Impact des réserves sur la reconnaissance de l’accident de travail et des maladies professionnelles
- Motifs légitimes pour émettre des réserves
- Liste des réserves non recevables au regard de la jurisprudence
Le seul moyen pour l’employeur de faire entendre sa voix étant d’émettre des réserves motivées, ce webinaire vous épargnera du temps et possiblement des coûts : évitez les pièges tenant à la fois à la rédaction et à la procédure de reconnaissance d’un accident ou d’une maladie professionnelle.

En cas de déclaration d’accident du travail sans arrêt, le taux AT sera-t’il impacté ?
OUI !
La cotisation accident du travail / maladie professionnelle (AT/MP) couvre les risques suivants :
- les risques “accidents du travail” ;
- les risques “maladies professionnelles” ;
- les risques “accidents de trajet”
Cette cotisation est à la charge de l’employeur et est versée chaque année, par toutes les entreprises, quel que soit leur effectif.
Le taux de la cotisation AT/MP est fixé chaque année par la Caisse d’Assurance Retraite et de Santé au Travail (Carsat) au regard de l’ensemble des évènements pris en charge par la caisse.
ce sont les coûts moyens qui constituent le coût total du risque.
6 catégories de coûts moyens pour incapacité temporaire
Ces catégories s’expriment en fonction de la durée de l’arrêt de travail que l’accident ou la maladie d’origine professionnelle a engendré :
- IT 1 : 0 à 3 jours d’arrêt de travail
- IT 2 : 4 à 15 jours d’arrêt de travail
- IT 3 : 16 à 45 jours d’arrêt de travail
- IT 4 : 46 à 90 jours d’arrêt de travail
- IT 5 : 91 à 150 jours d’arrêt de travail
- IT 6 : 151 jours et plus d’arrêt de travail
Ainsi, une déclaration d’accident du travail qui fait l’objet d’une consultation médicale avec ou sans arrêt de travail (avec soins) viendra impacter le taux AT par l’imputation d’une IT 1.

Si un salarié ne se sent pas bien, l’employeur est-il dans l’obligation de faire une déclaration d’accident du travail ?
Article L441-1 du Code de la sécurité sociale : La victime d’un accident du travail doit, dans un délai déterminé, sauf le cas de force majeure, d’impossibilité absolue ou de motifs légitimes, en informer ou en faire informer l’employeur ou l’un de ses préposés.
Article L441-2 du code de la sécurité sociale : L’employeur ou l’un de ses préposés doit déclarer tout accident dont il a eu connaissance à la caisse primaire d’assurance maladie dont relève la victime selon des modalités et dans un délai déterminés.
Au regard de ces deux articles du Code de la sécurité sociale, il convient de préciser que l’employeur doit déclarer dans les 48 H tout accident dont il a eu connaissance par le salarié (dans les 24 h). Cela signifie que si le salarié qui ne se sent pas bien mais n’informe pas son employeur, l’employeur n’est pas tenu d’établir une déclaration.
En revanche, si un salarié souhaite déclarer un accident du travail dont il prétend être victime, l’employeur est dans l’obligation d’émettre une déclaration sur les seuls dires du salarié.

Peut-on émettre des réserves sur des lésions psychologiques complémentaires déclarées à la suite d’une chute ayant fait l’objet d’un certificat médical initial mentionnant des lésions physiques ?
OUI !
La Caisse Primaire adresse, par tout moyen conférant date certaine à sa réception, le double du certificat médical constatant la rechute ou la nouvelle lésion à l’employeur à qui la décision est susceptible de faire grief.
L’employeur dispose d’un délai de dix jours francs à compter de la réception du certificat médical pour émettre auprès de la caisse, par tout moyen conférant date certaine à leur réception, des réserves motivées. La caisse les transmet sans délai au médecin-conseil.
Le médecin-conseil, s’il l’estime nécessaire ou en cas de réserves motivées, adresse un questionnaire médical à la victime ou ses représentants et il y joint, le cas échéant, les réserves motivées formulées par l’employeur. Le questionnaire est retourné dans un délai de vingt jours francs à compter de sa date de réception.
Comme pour une déclaration d’accident du travail, l’employeur dispose d’un délai de 10 jours francs à compter de la réception du certificat médical mentionnant soit une rechute soit une nouvelle lésion pour émettre des réserves motivées.
En effet, la demande portant sur l’imputabilité ou non d’une lésion nouvelle à un accident du travail est une mesure d’instruction nécessitant la mise en œuvre de la procédure contradictoire.
L’instruction préalable à la prise des nouvelles lésions survenues postérieurement, si les certificats médicaux postérieurs ne font pas état de la même pathologie, doit mettre en évidence un lien de causalité et rapporter la preuve de leur rattachement à l’accident initial.

Peut-on émettre des réserves sur les “certificats de complaisance” lorsqu’il y a bien un “fait accidentel” ?
NON !
Les réserves motivées permettent à l’employeur d’exprimer des doutes quant à la qualification de l’accident en tant qu’accident de travail. Ces réserves doivent être formulées de manière explicite et étayée, soulevant des questions sur la réalité de l’accident ou sur le lien avec l’activité professionnelle.
Elles ne peuvent porter que sur :
- des circonstances de lieu et de temps
- l’existence d’une cause étrangère au travail
Ne constitue pas une réserve motivée, l’existence supposée d’un certificat de complaisance qui ne serait basée que sur une supposition, hors éléments médicals.
Si l’employeur suspecte un arrêt de complaisance, il doit user de son droit à la contre -visite médicale, soit par l’intermédiaire de la sécurité sociale, soit par l’intermédiaire d’un médecin contrôleur désigné par lui. (pour plus d’information sur la contrevisite patronale : ⇒replay

Peut-on émettre des réserves alors que le salarié déclare une douleur thoracique et des fourmillements aux mains alors qu’il montait simplement un escalier ?
OUI !
La réserve motivée portant sur une cause étrangère au travail, il convient de soulever qu’en pareil cas il n’est pas possible de rattacher ces douleurs à un quelconque fait accidentel précis et soudain ayant eu lieu au temps et au lieu du travail.
La matérialité ne reposant que sur les seules déclarations du salarié, il n’existe pas de preuve que la douleur soit imputable à un accident qui se serait produit par le fait ou à l’occasion du travail, ni même de présomptions favorables précises et concordantes en cette faveur.

Peut-on émettre des réserves relatives à un accident dont a été victime un intérimaire ? Qui doit répondre au questionnaire : l’agence d’intérim ou l’entreprise utilisatrice ?
OUI !
En cas d’accident survenu à un intérimaire, les entreprises utilisatrices doivent compléter le formulaire cerfa n°60-3741 (information préalable à la déclaration d’accident du travail) et l’envoyer dans les 24 h par lettre recommandée avec accusée de réception :
- Au service de prévention de la Carsat
- À l’inspection du travail
- À l’agence d’intérim chargée d’établir la déclaration d’accident du travail
En tant qu’employeur, l’agence d’intérim est responsable de la gestion administrative et juridique de ses intérimaires. En cas d’accident de travail, elle est donc en charge de remplir la déclaration d’accident du travail en complétant le formulaire cerfa n°14463*03 à transmettre sous 48 h à la CPAM.
L’agence doit également remettre à l’intérimaire une feuille d’accident de travail ou de maladie professionnelle (formulaire cerfa n°11383*02) dans les 24 h, afin de le dispenser rapidement de l’avance des frais médicaux.
En matière de réserves motivées, il convient d’adresser le formulaire accompagné d’un courrier, particulièrement à l’agence d’intérim.

Un représentant du personnel a eu un malaise lors d’une réunion syndicale. Est-ce un accident du travail, et peut-on le contester ?
OUI et NON !
Conformément à l’article L. 2315-10 du code du travail, le temps passé en délégation est de plein droit considéré comme temps de travail.
En dehors des horaires de travail et/ou en déplacement, les conditions de bénéfice de l’assurance accident de travail sont adaptées à l’activité des représentants. L’accident n’est couvert que si l’élu avait utilisé ses heures de délégation et qu’il était bien en train d’effectuer des démarches en rapport avec son mandat.
En cas de doute quant à la matérialité de l’accident, il est donc préconisé de rédiger des réserves motivées, notamment en cas de malaise, sur le lien de causalité entre le malaise et l’activité professionnelle.
La contestation est possible dans les deux mois qui suivent la notification de prise en charge par la caisse, et doit porter nécessairement sur l’absence de matérialité des faits et éventuellement sur des éléments médicaux relevant d’une pathologie préexistante.

Un salarié qui pleure suite à un échange avec un autre salarié peut-il être considéré comme un AT ?
OUI et NON !
En matière d’altercation survenue au temps et au lieu du travail, l’employeur doit, pour faire tomber la présomption, apporter la preuve que la victime s’est soustraite à son autorité et que les violences subies étaient étrangères à l’activité professionnelle.
La prise en charge comme accident du travail d’une altercation dans l’entreprise est admise , dès lors que l’altercation a bien une origine professionnelle et que le salarié ne s’est pas soustrait à l’autorité de son employeur.
Néanmoins, la déclaration d’accident devra décrire précisemment les faits, et faire l’objet d’une consultation médicale. Dans le cas contraire, une déclaration d’AT n’aura aucun effet.

Le registre d’AT bénin est toujours d’actualité, car la CPAM ne le fournit plus.
OUI !
Tous les accidents de travail ne donnent pas nécessairement lieu à une consultation médicale. Inscrire ces accidents “bénins” dans un registre permet au salarié de conserver ses droits en cas d’aggravation de son état justifiant à postériori une consultation médicale, et à l’employeur de répondre à son obligation de déclaration.
Les conditions pour mettre en place un registre des accidents bénins
- justifier de la présence permanente d’un médecin, ou d’un pharmacien, ou d’un infirmier diplômé d’État, ou d’une personne chargée d’une mission d’hygiène et de sécurité dans l’entreprise détentrice d’un diplôme national de secouriste complété par le certificat de sauveteur secouriste du travail délivré par l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS) ou les caisses d’assurance retraite et de la santé au travail (Carsat) ;
- avoir un poste de secours d’urgence ; (local désigné doté d’une armoire à pharmacie, d’un téléphone et d’un point d’eau et où les numéros d’urgence sont affichés)
- respecter ses obligations concernant la constitution du CSE pour les entreprises d’au moins 11 salariés.
Le registre doit indiquer clairement les noms et prénoms, les circonstances de l’accident, la lésion concernée, le donneur de soins et la signature de la victime.
Depuis le 1er mai 2021, l’employeur n’a plus besoin de l’autorisation préalable de la Carsat pour tenir un registre des accidents bénins. Il doit uniquement l’informer de l’ouverture du registre, sans délai et par tout moyen conférant date certaine.

Nous avons établi plusieurs réserves motivées, absence de témoins sur une équipe de 15 personnes, antécédents médicaux sur le genou touché, averti 4 jours après en continuant ses journées de travail normalement, alors que la personne est coutumière du fait et qu’elle connait la procédure. L’Assurance maladie a quand même reconnu l’AT !
Il n’est pas rare de constater qu’au regard de réserves que l’employeur estime “motivées”, la caisse primaire procède néanmoins à la prise en charge d’un accident sans instruction préalable.
Selon les dispositions de l’article R. 411-11 du code de la sécurité sociale : « en cas de réserves motivées de l’employeur ou si elle l’estime nécessaire, la caisse envoie, avant décision, à l’employeur et à la victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l’accident ou de la maladie, ou procède à une enquête auprès des intéressés ».
Pour justifier l’absence de mesures d’instruction, la CPAM estime parfois que les réserves émises par l’employeur ne sont pas motivées au sens où il n’apporte pas la preuve d’une cause totalement étrangère au travail, mais se limite à instiller un doute sur la véracité des déclarations du salarié.
Dans cette hypothèse, l’employeur peut contester devant la commission de recours amiable au motifque la caisse primaire a pris en charge un accident du travail sans avoir préalablement diligenté d’enquête. la cour de cassation rappelle par ailleurs que l’employeur n’est pas tenu, au stade de la recevabilité des réserves, d’apporter la preuve de leur bien-fondé. Dès lors que l’employeur a, dans le délai imparti, formulé des réserves quant aux circonstances de temps et de lieu du sinistre ainsi que sur la matérialité du fait accidentel, la caisse ne peut pas prendre de décision sans procéder à une instruction préalable.

Un salarié déclare un accident de trajet alors qu’il rentrait chez lui. Pouvons-nous mettre en avant que le salarié a interrompu sa mission pour un motif personnel et qu’il n’était plus sous l’autorité de l’employeur ?
OUI et NON !
Pour rappel, un accident de trajet n’a aucune influence sur le taux de cotisation de l’entreprise.
Le financement du risque trajet étant assuré par une majoration forfaitaire de la cotisation AT, fixée chaque année en fonction des dépenses réalisées nationalement, et indépendante du nombre d’accidents de trajet dans l’entreprise.
De sorte que les réserves relatives à un accident de trajet permettront uniquement de priver le salarié d’une indemnisation propre à la législation professionnelle.
Il est donc possible d’émettre des réserves, notamment, en cas de trajet interrompu ou détourné pour un motif dicté par l’intérêt personnel.
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